Avec "African Reggae", Nina Hagen mêle punk, reggae et yodel

En 1979, les Drôles de Dames arrivent devant nos yeux, le premier walkman arrive sur nos têtes et Nina Hagen chante « African Reggae ».

Katharina, dite Nina, a 24 ans ; elle est est-allemande. Elle a tenté sa chance comme comédienne et chanteuse. Et elle n'est pas dans les clous. "Je me suis fait expulser d'Allemagne de l'Est en 1976 pour attitude antisociale" … Direction Londres.

Et Londres en 1976, c'est l'explosion du punk. Et Nina plonge.

Avec le punk, des filles sont dans la place. Elles ne sont plus seulement dans le public, mais sur scène. Elles ne sont plus seulement chanteuses, mais occupent des postes habituellement réservés aux garçons. La femme objet sexuel, c'est non - mais choisir d'être sexy, c'est oui. Et Nina adhère, "parce que pour changer le monde, il faut commencer par se changer soi-même".

À Londres, Nina est copine avec The Slits, ("les fentes"), groupe féminin qui mêle punk rock et reggae. Or, quand Nina rentre en Allemagne de l'Ouest, le reggae est quasi inexistant. Et de l'autre côté du mur, c'est idem. Et voilà qu'elle y ajoute une touche vocale toute personnelle qui va de l'art lyrique au rock gothique, en passant par le yodel tyrolien.

Pour le look, Nina fait aussi dans inédit. En 1979, on en est encore aux divas du disco, mais avec elle, le grand public découvre une autre silhouette.

"African Reggae" est diffusé à la radio, alors que le morceau est une célébration du hachich. La chanson célèbre aussi le continent africain, mais Nina Hagen dénonce l'excision de ses soeurs dans le dernier couplet.

"African Reggae" est donc un hymne féministe et libertaire en allemand, gorgé de reggae jamaïcain et de punk rock anglais, qui met la France et l'Allemagne d'accord, puisque le morceau est disco d'or des deux côtés de la frontière.

En 1979, Nina Hagen ne ressemble à rien de connu, mais la jeunesse se reconnaît en elle. Elle incarne une identité sans frontière, et nous sommes dix ans avant la chute du mur de Berlin.