"Les enseignants français ont perdu entre 15 et 25 % de rémunération" en 20 ans, selon un rapport du Sénat

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"Les enseignants français ont perdu entre 15 et 25 % de rémunération" en 20 ans, selon un rapport du Sénat

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En France, les enseignants passent 900 heures en classe alors que la moyenne européenne est de 738 heures
En France, les enseignants passent 900 heures en classe alors que la moyenne européenne est de 738 heures
© AFP - Nicolas Guyonnet

Salaire peu attractifs et inférieurs à beaucoup d'autres en Europe alors qu'ils passent plus de temps en classe : un rapport du Sénat présenté pendant l'examen du projet de loi de finances 2022 fait le point sur la situation des enseignants français et appelle le gouvernent à agir.

Le constat n'est pas nouveau mais il a été présenté en détail ces derniers jours en commission au Sénat dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2022 (rejeté ce mardi par la chambre haute), avec un rapport du sénateur LR de la Meuse, Gérard Longuet. Malgré le Grenelle de l'éducation qui a eu lieu cette année et les efforts en matière de revalorisation des métiers de l'Education nationale, le pouvoir d'achat des enseignants n'est pas à la hauteur, ce qui joue directement sur le manque d'attractivité de la profession.

Des enseignants de moins en moins bien rémunérés

Les chiffres sont nets : "En euros constants, les enseignants français ont perdu entre 15 et 25 % de rémunération au cours des 20 dernières années." Ceux qui se disent régulièrement peu valorisés, en début de carrière notamment, n'ont pas tort d'un point de vue financier. "En 2018, le salaire net en EQTP (En équivalent temps plein) d'un enseignant de l'éducation nationale, incluant le secteur privé sous contrat, était en moyenne de 2 564 euros par mois", précise le rapport. Les auteurs précisent d'ailleurs avoir le choix du salaire EQTP pour dresser leur constat, ce qui permet des comparaisons au niveau international, mais donne des montants plus importants que s'ils avaient utilisé le salaire net moyen, plus précis.

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Les écarts entre les enseignants qui arrivent dans le métier et ceux qui en sortent n'est pas anodin et ce quel que soit le niveau (certification, agrégation). Selon les données du ministère, "un professeur de moins de 30 ans ne gagne ainsi en moyenne que 1 806 euros nets par mois, soit 1,2 fois le salaire minimum de croissance (Smic), contre près de 1 000 euros supplémentaires en fin de carrière". On note toutefois que des "mesures prises au cours de l'actuel quinquennat", avec par exemple le Grenelle de l'Education (qui a débouché sur une enveloppe de 700 millions d'euros) induit des progrès en la matière, souligne les auteurs du rapport, qui appellent à poursuivre les efforts de soutien et de revalorisation des métiers.

2,6% de hausse du budget de l'Education nationale

Signe que le constat dressé par le rapport n'est pas totalement négatif, ses auteurs notent une hausse de 2,6% des crédits accordés à l'Education nationale dans le projet de loi de finances 2022, par rapport à 2021. Ce qui porte le budget de ce poste à 56,5 milliards d'euros, loin devant les autres. Le budget prévisionnel de la Défense notamment s'élève à 40,9 milliards d'euros. Une situation liée au statut de "premier employeur public" de l'Education nationale et donc aux fortes dépenses en personnel, avec 1,2 millions de personnes, dont plus des deux tiers sont des enseignants.

Plusieurs raisons à cette hausse : l'ancienneté des personnels, la dé-précarisation engagée et la poursuite des recrutements des AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap) avec 4 000 personnes de plus en septembre 2022, ou encore un certain nombre de mesures dites "catégorielles", comme la prime d'équipement informatique pour les enseignants (effort du gouvernement consenti en 2020, post premier confinement, pour revaloriser le métier) et la prime d'attractivité qui doit participer aussi à améliorer les débuts de carrières. En 2021, "un professeur débutant gagne ainsi 100 euros nets de plus chaque mois. Un contractuel en début de carrière gagne 54 euros nets de plus chaque mois", peut-on lire dans le rapport. Mais la grille salariale est encore "très défavorable aux enseignants en début de carrière", et constitue un véritable frein à l'attractivité du métier.

Moins bien lotis que dans le reste de l'Europe

Le salaire EQTP, s'il donne une vision moins forte des problématiques salariales, permet néanmoins les comparaisons avec les autres pays de l'Union européenne. Les sénateurs rappellent ainsi les conclusion du dernier rapport de l'OCDE sur l'éducation publié cette année, qui montrent que les rémunérations des enseignants sont encore bien en dessous de la moyenne européenne. En France, "le salaire statutaire des enseignants du primaire et du secondaire après dix ou quinze ans de service est inférieur d'au moins 15 % à la moyenne de l'OCDE", et les enseignants "commencent et terminent leur carrière avec un salaire inférieur à la moyenne de l'UE". Finlande, Danemark, Pays-Bas ou encore Allemagne sont au dessus, l'Italie en dessous.

Même avec les tentatives de rattrapage des gouvernements Hollande et Macron durant la dernière décennie, comme expliqué dans le rapport annuel de l'agence européenne Eurydice, les augmentations de salaires sont restées inférieures à celles des autres pays en Europe. Et le comble est relevé par les sénateurs français : "Les enseignants en France passent davantage de temps à enseigner devant les élèves que leurs collègues dans les pays européens en moyenne". En France, les enseignants passent 900 heures en classe alors que la moyenne européenne est de 738 heures, et même 691 heures pour l'Allemagne.

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